Les origines de la Capoeira
Il y a environ 400 ans, la capoeira est apparue au Brésil, en réponse au désir de liberté des esclaves africains. Bien plus qu’un simple art martial, elle symbolisait l’espoir et la résistance. Cet art unique puise ses racines dans la culture afro-brésilienne et se distingue par son mélange de combat, de danse et de musique.
Les esclaves, soumis à des conditions de vie extrêmes, développèrent cette pratique sous couvert de danse et de chant pour dissimuler son véritable objectif : l’entraînement au combat. La roda, ou cercle de capoeira, incarne encore aujourd’hui cette quête de liberté et de solidarité. En intégrant des instruments et des chants, les capoeiristes rendaient hommage à leurs ancêtres tout en préservant un lien fort avec leurs origines.
La capoeira est le fruit d’un métissage culturel profond. Si certains s’interrogent sur son origine africaine ou brésilienne, il est indéniable que cet art martial est né au Brésil sous l’influence des traditions africaines et des réalités de l’esclavage. Entre le XVIe et le XIXe siècle, près de quatre millions d’esclaves furent déportés d’Afrique vers le Brésil, principalement depuis le Congo, l’Angola, le Soudan, le Gabon et le Mozambique, pour travailler dans les plantations de coton et de canne à sucre.
Une lutte dissimulée dans la musique
À l’époque esclavagiste, les esclaves se réunissaient après de longues journées de travail dans les senzalas (habitations des esclaves) pour se reposer, honorer leurs ancêtres et pratiquer la capoeira. Face à l’oppression coloniale, ils durent ruser pour préserver leur culture. Ainsi, les chants et percussions accompagnant leurs mouvements avaient une double fonction : entretenir leur héritage et masquer l’aspect combatif de leur art.
Si la capoeira traditionnelle pouvait initialement se passer de musique, elle s’est progressivement enrichie de rythmes et de chants qui lui sont désormais indissociables. Les esclaves fugitifs, souvent cachés dans les forêts et les hautes herbes, utilisaient la capoeira pour se défendre. D’ailleurs, le mot « capoeira » en portugais désigne aujourd’hui ces zones de végétation.
L’abolition de l’esclavage et la répression de la capoeira
À la fin du XIXe siècle, l’esclavage fut aboli, mais les anciens esclaves durent affronter la misère et l’exclusion sociale. La capoeira, autrefois un symbole de résistance, fut alors utilisée pour la survie et associée à des actes criminels. Son image se dégrada au point que le gouvernement brésilien prit des mesures radicales : la capoeira fut interdite, et ses pratiquants persécutés et emprisonnés.
La capoeira dans la guerre du Paraguay
Entre 1864 et 1870, lors de la guerre du Paraguay, le Brésil, en difficulté, fit appel aux capoeiristes emprisonnés. En échange de leur liberté, ils durent combattre. Leur habileté et leurs techniques contribuèrent à la victoire brésilienne, et leur bravoure fut reconnue à travers le célèbre chant de capoeira Paranauê, Parana.
Mestre Bimba et la renaissance de la capoeira
Mestre Bimba
Malgré cette reconnaissance, la capoeira resta interdite jusqu’en 1930, lorsqu’un maître de capoeira originaire de Bahia, Mestre Bimba, la présenta au président Getúlio Vargas. Impressionné, ce dernier légalisa la discipline, sous réserve qu’elle soit pratiquée dans des lieux fermés.
Mestre Bimba structura alors la capoeira en codifiant ses mouvements et en fondant la première académie officielle. Il chercha à faire de la capoeira un art martial respecté, en l’éloignant de son passé de marginalité. Son enseignement permit à la capoeira de se développer et de s’exporter dans le monde entier, y compris en Europe.
La capoeira Régional et la Capoeira Angola
Deux grandes écoles de capoeira émergèrent : la Capoeira Angola et la Capoeira Régionale.
- Capoeira Angola : Plus traditionnelle, elle met l’accent sur la ruse et la lenteur des mouvements, avec un jeu ancré dans la culture et les traditions.
- Capoeira Régionale : Plus dynamique et spectaculaire, elle intègre des influences d’autres arts martiaux comme la boxe et le jiu-jitsu. Mestre Bimba l’a développée pour rendre la capoeira plus accessible et reconnue.
En 1941, Mestre Pastinha, fondateur du Centro Esportivo de Capoeira Angola, modernisa la capoeira Angola en y intégrant des instruments comme l’atabaque et en mettant en avant son aspect culturel et éducatif.
Étymologie et influences culturelles
Le mot « capoeira » pourrait provenir de capão (coq en portugais), en référence aux esclaves comparés à des animaux en cage, ou du tupi-guarani, signifiant « forêt en régénération ».
Après l’abolition de l’esclavage, le gouvernement brésilien assimila la capoeira à la délinquance et introduisit le terme capoeiragem pour désigner les comportements antisociaux des anciens esclaves.
La capoeira est aussi liée au Candomblé, une religion afro-brésilienne qui a influencé ses chants et rituels. Toutefois, la capoeira n’est pas une religion, mais un art martial en constante évolution, pratiqué aujourd’hui dans le monde entier et popularisé à travers la musique, la danse et même le cinéma.
La capoeira aujourd’hui
Avec plus de 30 ans d’existence en France et une présence croissante dans les grandes villes européennes, la capoeira continue de séduire par sa richesse culturelle et son dynamisme.
Elle incarne des valeurs essentielles telles que le respect, la tolérance et la solidarité, faisant d’elle bien plus qu’un sport : un véritable art de vivre.

Maculélé